lundi 20 août 2012

Randonnée jurassienne 2012

 Grande Traversée du Jura



Participants

Michel et Michelle
Henri et Christine
Claire et Philippe
Odile
Marthe
Jean-Pierre

Voir l'album de photos seul :
Randonnée Jura

Cette traversée fait suite à une proposition de Michel. C’est lors d’une balade dans le vallon des Millefonts alors que nous nous reposions au-dessus du col de Barn que l’idée a émergé de quitter nos Alpes Maritimes chéries pour visiter le Jura ! Il faut dire que le Jura est le lieu de défoulement de Michel quand il veut se sortir des soucis quotidiens. Nous verrons à l’expérience qu’il en a parcouru le moindre vallon soit à ski de fond, soit en VTT !
Donc après divers échanges par e_mail, nous tombons d’accord sur une traversée qui semble appétissante. Bien sûr la contrainte liée à notre âge respectable reste toujours de faire étape dans des gîtes confortables avec ½ pension assurée. Cela est difficile dans le Jura, la plus part des refuges en Suisse ne fournissant pas la restauration, mais grâce aux services du web nous trouvons ce que nous cherchons sauf à la première cabane, la cabane de la Gym. On verra qu’il aurait été dommage de ne pas y séjourner.
La traversée est prévue sur six jours, du mardi 31 juillet au dimanche 5 août. Elle part de Gellin et arrive à Bellegarde où Michel et Philippe ont positionné deux voitures.
Départ de Valbonne lundi dans la voiture d’Henri en convoi avec Alain qui va s’installer à Puy St Vincent pour suivre les péripéties des jeux olympiques. Après une longue route, un pique nique sur le raccourci de Digne, notre arrivée à Gellin le soir vers 7 heures est splendide. D’abord le temps est décidément fixé au beau, ensuite l’accueil des Michels dépasse ce qu’on pouvait imaginer. Il y a même du crémant du Jura pour nous remettre des fatigues de la route. Maintenant nous allons suivre jour par jour nos aventures jurassiennes.

Le départ est prévu au chalet de Gellin comme indiqué dans la photo :

Mardi 31 juillet
Michel propose d’avancer les handicapés en voiture jusqu’à la forêt pour éviter la traversée de la plaine de Gellin. Il s’agit bien sûr des filles et de Jean-Pierre qui fait valoir sa hanche décrépie. Tout le monde se retrouve assis sur des rondins à l’orée de la forêt.
Le GR5 passe dans le coin et il suffirait de le suivre sans se presser jusqu’au Mt D’or, mais Michel a d’autres idées. Il faut dire qu’il a parcouru le moindre chemin dans ce massif en ski de fond ou en VTT. Nous voilà donc partis sur des petits chemins connus seulement des locaux et souvent dans une direction opposée à celle qui nous conduirait au sommet ! Nous découvrons les premières bouses de vache. D’après wikipedia une vache produit en moyenne 12 bouses par jour et vu le nombre de vaches qui se prélassent dès que la forêt laisse la place à la prairie toujours délicieusement verte, on peut imaginer qu’il faut regarder où on pose le pied !
Il faut chercher pour trouver un lieu de pique nique pas trop encombré de bouses et ombragé par de grands sapins.


Une fois installés, Claire et Philippe consulte leur menu. En effet ils ont prévu un menu par jour, dont des boites de petits pois, des rillettes de saumon, des boites de sardines et autres choses bien lourdes. Mais Philippe porte tout cela sans rechigner ! Les autres pour la plupart se contenteront pour toute la randonnée de quelques tranches de saucisson avec des wasas complétés éventuellement par ce qu’on a pu récupérer du petit déjeuner du refuge.
Après avoir bien erré dans la forêt, nous rejoignons un chemin qui mène directement à la cabane de la Gym et décidons d’y porter les sacs quitte à gravir le Mt d’Or ensuite.


L’accueil à cette cabane restera dans les annales.


Charly, que nous prenons d’abord pour le gardien, nous fait découvrir les beautés du refuge, nous pouvons même choisir notre dortoir étant les premiers arrivés. En revenant du Mt d’Or que nous ne pouvions pas décemment éviter, ce dernier étant le premier sommet de la balade, nous sommes invités à fêter cette conquête avec un verre (ou plusieurs verres pour certains) de rosé jurassien. Charly avait expressément apporté trois ou quatre bouteilles dans ce but, qu’il gardait au frais dans la cave du refuge !


Ainsi grâce à Charly la soirée commence bien. Il a des tas d’histoires à raconter dont en particulier l’histoire de la cabane qui prend son origine avant la dernière guerre. C’est un club de gymnastique (d’où le nom) qui a initialisé la construction. A cause de l’invasion de la France, il a fallu modifier le lieu d’implantation et finalement cette équipe de gymnastique a choisi le plus joli endroit du Mt d’Or.




La vue sur la chaîne du Mt Blanc est spectaculaire et va jusqu’au Cervin et le Mt Rose. La cabane a été terminée en 1942 et les Allemands qui tenaient le coté français ont été invités au cocktail d’inauguration. Ils sont effectivement venus mais sont restés juste de l’autre côté de la frontière malgré l’insistance des jeunes Suisses !
L’ambiance chaleureuse change avec l’arrivée du gardien officiel. Heureusement nous réglons le prix de la nuitée à Charly avant qu’il ne redescende dans la vallée, ce qui nous évitera d’avoir affaire avec ce gardien peu obligeant. Ce dernier arrive en 4*4 avec sa femme Astrid et quelques autres personnes dont des enfants. Le 4*4 ne cadre pas bien avec l’environnement, mais on comprend vite qu’il n’y a pas d’autre moyen pour hisser Astrid jusque là. Clairement le poids impose et Astrid prend les choses en main pour nous annoncer qu’il va falloir se serrer dans le dortoir. pour loger le gardien et ses amis, la chambre normalement réservée étant trop petite. Elle nous recommande des boules quies pour ne pas entendre les ronflements de ses hommes et pour mieux appuyer l’impression qu’on l’ennuie d’occuper le refuge, elle ajoute que de toute façon nous ne dormirons pas à cause du feu d’artifice. Ce n’est pas que nous soyons contre les feux d’artifices, d’autant que c’est le 1er août, la fête nationale suisse, mais la façon dont tout cela est présenté laisse un froid tel que nous n’essayerons de discuter et encore moins d’admirer les fusées lancées par le gardien (une toutes les 5 minutes et juste sous la fenêtre !), ce qui a certainement vexé ce dernier. Bon, nous regrettons fortement Charly et son accueil si chaleureux. Heureusement nous allons le revoir et même marcher sous sa conduite. En effet il a proposé de nous accompagner le lendemain matin pour nous conduire à La Mâche à partir de Vallorbe. De là un chemin facile va nous permettre de suivre toute la crête jusqu’à la Dent de Vaulion. C’est là une idée géniale que nous n’avions pas élaborée dans la préparation de l’itinéraire. Nous allons ainsi faire la Dent de Vaulion en  traversée ce qui est une superbe balade. Merci Commandant Charly !
Malgré l'accueil froid du gardien, le diner est excellemment préparé à base de pâtes et agrémenté de quelques bouteilles apportées par Michel (ce qui soulage certains sacs!).


Mercredi 1 août (fête nationale suisse)
La nuit ne s’est pas trop mal passée malgré les fusées du feu d’artifice sous la fenêtre. Lever à 7h pour un premier petit déjeuner succinct que nous espérons bien compléter à Vallorbe où nous avons rendez-vous avec Charly. Descente agréable dans une grande forêt de feuillus mélangés avec des sapins. Très beau temps. A l’horizon, le Mont Blanc s’éclaire au soleil levant.

Nous finissons le petit-déjeuner dans un café au bord de l’Orbe, la rivière qui traverse Vallorbe. Comme prévu, Charly nous rejoint et nous entraîne dans un cheminement complexe qu’il a concocté pour grimper jusqu’au lieu-dit La Mâche (1204) à partir duquel il suffit de suivre la crête jusqu’à la Dent de Vaulion. C’est un joli chemin qui serpente dans la forêt.


A un croisement nous rencontrons la fille de Charly qui semble l’attendre. Nous comprenons vite que ce n’est pas imprévu mais tout à fait planifié. Il est âgé le commandant et quoi qu’il en dise ses enfants sont inquiets de cette escapade qu’il a organisée pour nous mener à La Mâche.
Charly nous photographie les uns après les autres sortant de la forêt après cette dure montée.












C'était effectivement une rude montée...


Les adieux sont sincères. Nous nous rappellerons du commandant Charly, de son rosé bien frais, de sa bonne humeur et de son entrain. Nous le remercions aussi pour nous avoir conseillé la traversée de la Dent de Vaulion (que nous avions initialement prévu de gravir en A/R par la route !). Tout se termine par des cadeaux. J’hérite ainsi de la médaille que les militaires suisses portent sur leur caquette, Michel de celle identifiant un attaché à l’état-major et Christine d’un petit couteau suisse avec ciseaux incorporés.


Très confus, Jean-Pierre se met à genoux comme pour un adoubement de chevalier et reçoit ainsi son chapeau décoré de l'insigne des mains mêmes du maître !



Une dernière photo avec Charly au milieu du groupe...


Mais il faut bien continuer et après les derniers adieux, nous prenons le chemin sur la crête. Christine criant famine, nous découvrons un endroit sympathique, juste au bord de la falaise qui plonge vers Vallorbe et la vallée de l’Orbe.





Répétition du cérémonial des Bos pour le menu du deuxième jour. Il faut reconnaître que le régime saucisson sec et wasa devient vite un peu lassant et on regarde les Bos avec envie ! Ce d’autant plus que pour Philippe, c’est un cérémonial diététique destiné à assurer la conquête de tous les sommets du Jura auxquels nous avons prévu de nous mesurer. Bon, c’est peut-être un peu exagéré de parler de sommets, ce sont plutôt des bosses qui se perdent au milieu des crêtes et des vallons que nous suivons, ce ne sont pas les Alpes même Maritimes ! Mais quel décor ! C’est au point qu’on envie les vaches qui broutent cette herbe encore verte en plein mois d’août et peuvent la ruminer tranquillement avec une vue superbe sur le Mont Blanc !
La Dent de Vaulion (1482) est sans conteste le sommet le plus distinct. On le repérera jusqu’à la fin de la balade. Nous trouvons au sommet une table d’orientation qui nous permet de mieux repérer le Cervin et la Dent Blanche (la discussion sur le sujet étant assez tendue).


Bien sûr nous repérons le chemin déjà parcouru avec le Mt d'Or au fond.


Sans le conseil éclairé de Charly, nous serions passé à côté du lac de Joux et le village du Pont où Michelle rêvait de prendre une bière.
 

Un énorme tas de bois est installé au sommet pour être allumé le soir du 1er août. Une habitude suisse !


De la Dent de Vaulion, nous redescendons pas le chemin des touristes avec passage obligé à côté d’un bar-restaurant saturé où nous évitons de nous arrêter. Il faut dire que le café fourni quotidiennement par Henri en plein milieu de la montagne vaut cent fois celui des touristes ! En fait nous nous apercevrons plus tard que nous aurions dû descendre sous le télésiège qui arrive au sommet. En effet les chemins indiqués sur la carte ont souvent disparu et nous sommes obligés de descendre par la crête jusqu’à un bled appelé Petra-Felix. De là nous pouvons enfin prendre la direction de la Breguette (1080), notre halte pour la nuit.
Le logement est « top level » avec dortoir privatif et trois ou quatre douches disponibles.




Finalement nous avons réussi à arriver vers 5h et cela nous permet de laver quelques vêtements ou autres soutifs que nous mettons à sécher sous la fenêtre. Le serveur viendra gentiment nous avertir pendant le repas de rentrer le linge, l’orage menaçant. Ce dernier sera d’ailleurs assez violent mais relativement court. Le soir, ce sera plutôt les feux d’artifice du 1er août qui interrompront notre sommeil.
Le repas spécial 1er août est excellent, avec du feuilleté de champignons (morilles) et de la raclette.

Jeudi 2 août
L’objectif de la journée est d’atteindre un hôtel situé au col de Marchairuz (1447) en passant par le col de Malendruz (1134) et le Mont Tendre (1679). Ce sera le plus haut sommet de la balade puisque la pluie nous interdira l’accès au Crêt de la Neige (1717). Ce sommet nous plongera au cœur du pays jurassien. Un pays tout en vallons herbeux entourés de vastes forêts impénétrables sauf par les bûcherons.









Comme il faut empêcher les vaches qui vivent tout l’été en liberté dans la pâture de se balader n’importe où, les vachers ont construit au cours des siècles passés d’adorables murets qui serpentent entre les vallons, limitant ainsi le pâturage de troupeau.


Evidemment les petits murets demandent de l’entretien et ils sont progressivement remplacés par des fils électriques ou des barbelés. Nous apprendrons à traverser ces petits murets par des passages étroits, nous deviendrons également experts dans l’art d’ouvrir les fils électriques sans prendre la décharge.


En général le passage est bien prévu mais parfois il faut le forcer en passant sous le fil ou au-dessus. En plus il semble que les vaches aiment bien surveiller ces passages, peut-être rêvent-elles d’évasion. En tout cas les bouses pullulent à la sortie et il faut bien regarder où on met les pieds !
Une autre découverte étonnante pour nous des Alpes Maritimes, ce sont les citernes. Chaque vacherie d’alpage dispose de sa citerne, en général bien enterrée et entourée d’un joli muret pour empêcher les vaches de lâcher trop de bouses sur le couvercle.


C’est que dans le Jura, il n’y a pas d’eau ! Ce n’est pourtant pas la pluie qui manque (1000 à 2000mm de précipitations par an selon wikipedia), mais l’eau disparaît au fur et à mesure qu’elle tombe. Les torrents n’existent pas dans le Jura ! C’est l’effet du relief est karstique, une montagne de calcaire. L’eau ressurgit beaucoup plus bas, elle sort de grottes profondes comme la source du Doubs ou la source de la Loue. Même à l’hôtel de Marchairuz, on nous recommandera de pas boire l’eau qui vient de la citerne (à moins que ce ne soit une démarche marketing…).
En quittant la cabane de la Breguette, nous suivons un cheminement est un peu hasardeux (l’hôtesse ne connaît même pas le col du Mollendruz !), mais nous finissons par vite retrouver la piste n°5 bien balisée.


Heureusement d’ailleurs, parce que les chemins du Jura sont loin d’être évidents et on aurait vite fait de se perdre avec un peu de brouillard. Cette piste n°5 sera notre ligne de vie, elle suit en gros la crête quoique le nom de crête ne corresponde pas bien à la réalité, c’est une suite de vallons adorables où l’on ne risque pas d’attraper le vertige ! Dans l’un des vallons, Odile ressent un besoin pressent de faire un sacrifice à la nature. Il faut dire qu’elle avait fini la veille tout mon sachet de pruneaux ! Elle revient de sous son arbre avec un pantalon à la place du short. Heureusement elle aura le temps de faire la lessive à l’hôtel.
Le Mont Tendre (1679) porte bien son nom. C’est bien le tendre Jura qui nous accueille en son sein ! Il se dépouille de ses sapins pour nous faire admirer enfin la vue sur la chaîne du Mont Blanc.
On le voit ici depuis le Crêt de la Neuve où nous passerons plus tard, mais l'association que fait la photo est trop tentante pour attendre de la montrer !


Du Mt Tendre nous repérons le chemin parcouru avec la Dent de Vaulion déjà bien loin !


Pique nique juste sous le sommet et bien sûr le café d'Henri préparé soigneusement à l'abri du vent.




Nous passons ensuite à côté de la cabane du Cunay (CAS) pour finalement arriver à l’improviste au col de Marchairuz et l’hôtel homonyme (1447). L’étape n’a pas été trop longue (enfin cela dépend de qui le dit…) et nous avons le temps de prendre une bonne douche. Le dortoir est offert avec des couettes propres et la nuit sera délicieusement réparatrice (en tout cas pour la hanche…).
La soirée commence par un apéritif servi avec un crémant du Jura. Il s’agit en effet de fêter l’anniversaire du mariage de Claire avec Philippe. Commémoration de ce mariage jurassien au sommet du Morond (1419).
Dîner excellent avec un bon rösti traditionnel (pommes de terre découpées en frites et cuites avec lardons et fromage du coin). Pour terminer un gâteau au chocolat. Marthe n’hésitera pas à lécher toutes les assiettes !

Vendredi 3 août
Réveil un peu tard (8h) dû aux contraintes de l’hôtel. Mais nous ne voulons pas sauter le petit-déjeuner ! La journée s’annonce paisible, beau temps et temps de marche limitée puisque la première pancarte indique St Cergue à 4h. En ajoutant 1h30, on devrait être à la cabane de la Dôle vers 16h, ce qui nous laissera bien le temps de prendre la douche et flâner tranquillement. Christine se méfie quand même, la journée précédente a été assez longue, aussi elle préfère attaquer en auto stop pour nous rejoindre sans forcer à la cabane de la Dôle. Elle ne saura jamais ce qu’elle a raté, mais assurément elle a eu un bon flair ! Parfois je me demande si le temps indiqué pour St Cergue n’était pas un temps pour VTT !
En tout cas nous partons plein d’entrain mais sans Christine qui commence déjà à nous manquer. Mais rassurez-vous, Henri lui téléphone toutes les cinq minutes et nous suivons son périple étape par étape. Nous apprendrons ainsi qu’elle est bien arrivée, que la cabane est agréable, qu’elle a pris une bonne douche, que les hôtes sont très accueillants. La cabane, paraît-il, serait assez rustique ou plutôt typique comme on dit, ce qui ne nous déçoit pas. D’ailleurs en arrivant complètement vanné vers 19h30, nous la trouverons en train de siroter un petit rosé avec un ami du gardien qui cherche à la consoler de notre absence trop prolongée !
Mais venons en au fait. La marche est délicieusement agréable jusqu’au Crêt de la Neuve (1495). Toujours pas de grosse montée, seulement des bosses et des vallons parsemés de portes à vaches.


Sur la photo on distingue au loin le Crêt de la Neige, notre dernier objectif :


Le Crêt de la Neuve (prononcer avec l’accent : la Neuuuve) est un charmant piton avec une superbe vue sur la chaîne du Mont Blanc. Nous en profitons pour nous reposer un peu, surtout que d’aucuns affirment qu’on a fait presque la moitié du chemin.





La grande discussion aura lieu un peu plus loin devant une ferme agrémentée de sa citerne comme d’habitude. La question est simple ! soit nous suivons tranquillement notre n°5 chéri jusqu’à St Cergue, soit nous partons  à l’aventure pour rejoindre un autre chemin balisé dans la combe des Amburnex qui conduit au col de Givrine. La pancarte pour St Cergue indique 2h. Après St Cergue, nous estimons qu’il reste 1h30 pour accéder à la cabane de la Dôle. C’est comme si nous y étions ! Nous envisageons un vote quand Michelle prend les devants et attaque le chemin inconnu qui devrait rejoindre la cabane des Pralets. La décision est donc prise et tout le monde lui emboîte le pas. Visiblement Michelle n’aime pas les discussions un peu trop longues, ni les votes. D’après moi, le chemin par la cabane des Pralets devrait être plus court malgré la distance transversale pour le rejoindre. C’est aussi l’avis de Michel, mais vu le temps qu’il va nous falloir pour rejoindre le col de Givrine (1207), cela s’avérera un choix malencontreux. En plus on  aurait pu se taper une bière à St Cergue.
St Cergue nous suivra sur les panneaux indicateurs pendant toute la suite de la balade et deviendra un mythe !
Nous quittons donc notre cher n°5 pour l’aventure. En fait, il s’agit de quitter la crête de la Neuve pour rejoindre dans la combe des Amburnex à la cabane des Pralets, là un autre chemin balisé nous conduira directement à Givrine. Le pique nique au milieu de la traversée sera réussi. J’aurai même le droit de goûter les rillettes de saumon au menu Bos du jour.
Reste à rejoindre ce fameux Givrine qui remplace St Cergue dans notre circuit. Et là nous avons commencé à nous demander quand cela se terminerait ! En plus Christine n’arrêtait pas d’envoyer des messages disant combien elle était bien à la cabane de la Dôle ! Il faut dire que dans le Jura il y a plein de vacherie, chacune avec sa citerne, et toujours une route goudronnée pour y accéder. Alors nous débitons tranquillement des kilomètres de route sans en voir la fin !


Le Mont Dôle paraît encore à une distance infinie et c'est pourtant là que nous devons trouver la cabane.


Et puis soudain, c’est la gare de Givrine. Un joli petit train passe par là en venant de Nyon jusqu’à La Cure. Martin aimerait (il adore les trains paraît-il et Philippe envisage de lui faire prendre le train des Merveilles de Nice à Tende).
Nous rejoignons le GR5 qui passe dans le coin, puis hésitons sur le chemin à suivre, Michel et moi ayant une idée très arrêtée sur un raccourci qui ferait gagner un peu de temps. Mais cette fois-ci, les filles prennent les choses en main. Elles commencent par se renseigner auprès d’un habitant du coin et les voilà parties devant. Il ne reste plus qu’à les suivre. Le chemin ainsi conseillé rejoint la fameuse n°5 qui s’appelle ici le Balcon du Léman. J’ai quand même l’occasion de me rattraper avec un chemin direct alors que Michel préfère passer par la Barillette et grimper 100m de plus.
Quand j’entre le premier dans la cabane de la Dôle, Christine est tellement contente de me voir qu’elle m’embrasse ! La pauvre commençait à s’inquiéter malgré le réconfort du gardien. Cette cabane est en fait une vacherie en activité dans laquelle le propriétaire a aménagé un gîte. On la voit sur cette photo prise du sommet de la Dôle :


Nous arrivons à la tombée de la nuit mais un grand feu dans la cheminée nous réconfortera. On voit la fumée sortir de la cheminée !


Bon les dortoirs sont un peu limites avec juste un matelas à même le sol, en plus ça sent la vache comme c’est pas possible ce qui est normal puisque les vaches sont juste en dessous (comme à St Véran à 2000m où on cherche à récupérer la chaleur des vaches). Par contre la salle de bain est parfaite, toute neuve apparemment et la douche du soir bienvenue après cette longue marche. Le repas sera « top level » avec des crudités suivi d’une fondue préparée par la charmante Polonaise qui tient le refuge avec une autre aide. Le gardien lui est enchanté de nous voir et nous offre la bière de bienvenue, mais il a d’autres occupations avec les 250 vaches qu'il garde sur son territoire. Il n’en traie que deux, les autres se débrouillent avec leurs veaux, mais chaque soir il fait un tour des prairies pour vérifier que tout se passe bien et qu'il ne faut pas aider une vache à vêler. Il reviendra quand même avant le coucher pour nous offrir un "café fertig", sa spécialité. Je lui demande quel alcool il met dans ce café en plus du lait, mais ça il ne veut pas dire : un mélange complexe qu'il répond. Sans doute de la prune ou quelque chose comme cela. En tout cas on le sens passer. Heureusement il nous fait préparer trois tasses seulement que nous nous partageons (parce que lui ne fait rien dans la cuisine, ce sont les femmes qu'il emploie qui en sont chargées). Après la fondue, les deux boutelles de blanc local et le café fertig, plus l'odeur de la vache sur des matelats à même, le sol, la nuit sera dure...

Samedi 4 août
Comme d’habitude les pancartes du n°5 semblent indiquer le col de la Faucille (1340)  à 2h. Arrivés à ce col, nous devons prendre le télécabine jusqu’au Petit Montrond (1534) et ensuite suivre une crête en descente jusqu’au refuge de la Loge (1380). Crête qui promet d’être superbe, en balcon au-dessus du Leman. En fait la crête sera correspondra à nos expectations, mais pas la durée de la marche. Comme la veille, il faudra doubler les temps indiqués.
Donc nous partons à l’aube (de toute façon on n’aurait pas envie de faire la grasse matinée dans les dortoirs parfumés à la vache) pour attaquer le sommet de la Dôle. Nous apercevrons là notre premier chamois. Et oui, les chamois ne sont pas réservés aux Alpes !


La vue du sommet est magnifique, malgré le décor contraignant du radar de l'aéroport de Genève.


Vue sur les Rousses :


Vue sur le Léman et les Alpes :


Vue sur le Crêt de la Neige (bien trop loin !) :



De l’autre côté du sommet, on rejoint ceux qui en voulu éviter de grimper quelques mètres en trop et nous voilà  parti sur le Balcon du Léman. Du sommet jusqu’à la forêt plus bas, la vue est magnifique sur le Leman et les Alpes avec les Dents du Midi qui dominent le lac et plus loin le massif du Mt Blanc.
Mais une fois rejoint la forêt, il ne se passe plusrien ! C’est une belle forêt au demeurant, mais au bout de 10mn on aimerait voir autre chose et ce d’autant plus que le chemin est devenu une route goudronnée.


Michel, voyant cela, s’empresse de nous diriger vers un petit chemin plus ou moins abandonné qui nous fera éviter un morceau de route et la traversée du village de la Vattay. Nous rejoignons plus loin notre GR et alors que les choses se corsent. Ce chemin dit GR se lance pour gravir une falaise dans des conditions qui ne correspondent pas à la qualification de GR. Ce serait plutôt une sente très raide, boueuse qui s’appuie sur les arbres pour se retenir de glisser en bas !
Une fois arrivés sur le plateau (1483) où débouche le chemin, on se dit que le plus dur est fait. Donc repos pour tout le monde.
Mais c’est loin d’être fini. Le chemin traverse maintenant une nouvelle forêt dans un relief de crevasses, gouffres et autres contorsions calcaires incroyables.







Et bien sûr le chemin prend son temps pour traverser un tel relief tourmenté. Nous apprécions un point de vue sur la vallée de la Valserine à partir du lieu dit « Notre Dame des Neiges », vallée que nous parcourrons en voiture dans deux jours.
Enfin après un pique nique un peu mal placé au bord d’un chemin (des jeunes perdus viendront nous déranger sans complexe), nous débouchons brusquement sur le col de la Faucille (1320) juste devant un hôtel top luxe avec piscine. Envie d’un bon bain, mais on attendra la bonne douche au refuge de la Loge (CAF, 1380). Cette douche restera malheureusement un rêve !
Nous sommes désormais en France, mais il est difficile de savoir où passe la frontière, son tracé défie le sens commun qui voudrait suivre la ligne de crête. Il paraît d’ailleurs qu’un café quelque part aux Rousses a un morceau en Suisse et l’autre en France. Il fait chaud, il y a plein de touristes qui n’ont pas à se taper encore 5 ou 6h de marche, alors avec les Michels, nous nous précipitons sur le télécabine. A la station supérieure un self service permet de compléter nos réserves pour la longue marche à venir.
Ce sera effectivement long, mais il faut dire que cette balade de crête en passant par le Grand Montrond (1664), le Pas de l’Echine et le Colombey de Gex (1688) est superbe avec la vue sur le Leman et la chaîne des Alpes. On ne s’en lasse pas.

Photo prise au Grand Montrond :


Et le Petit Montrond :



Une belle crête large à souhait mais qui tombe à pique vers le Léman :


Un orage gronde au loin qui se rapproche et c’est sous la pluie que nous arrivons au Colombey de Gex. Cela permet d’avoir un petit goût authentique du Jura et aussi de tester nos différents ponchos.



Après le Colombey, c’est encore une longue descente plus ou moins plate qui n’en finit pas.


Au col de Crozet (1485) nous distinguons l’arrivée d’une télécabine qui monte de Lélex  Il ne reste plus qu’à trouver le refuge situé un peu plus bas.
Le refuge de la Loge est un peu vieillot pour ne pas dire ringard. En tout cas on peut dire adieu à la douche tant attendue ! Heureusement la gardienne est délicieuse et en plus bonne cuisinière, ce qui fera un peu oublier les désagréments du confort. Le chat Gribouille nous donne l’exemple pour ne pas prendre la vie du mauvais côté !

Dimanche 5 août
Pluie. Une bonne pluie jurassienne qui n’a pas l’air de vouloir s’arrêter bientôt. Nous ne terminerons pas comme prévu par le Crêt de la Neige (1720), le plus haut sommet du Jura (quoique certains contestent…). Il faut descendre. Dans ce pays on peut facilement se perdre dans le brouillard et puis à quoi cela sert-il de forcer si on n’y voit rien !


Une dernière photo du refuge et surtout du chemin que nous aurions dû prendre si le soleil avait été au rendez-vous :




Donc descente tranquille sur Lelex sous une petite pluie qui heureusement s’arrête à l’arrivée.


Je dis heureusement parce que c’est la fête au village. Défilé avec quelques chars, des déguisements divers et surtout une bande de garçons attachés à deux immenses skis de fond qu’ils soulèvent tous ensemble l’un après l’autre. Sympathique surtout qu’à chaque bar, l’équipe s’arrête pour boire le verre du patron (et ce ne doit pas être du coca cola !). A l’occasion de la fête, des braves dames vendent des gâteaux de leur fabrication. J’en achète trois pour la soirée prévue à Gellin. Henri de son côté revient avec quatre bouteilles de vin.
Pendant ce temps Michel et Philippe sont partis chercher les voitures laissées au-dessus de Bellegarde, notre arrivée initialement prévue. Un groupe rencontré au refuge de la Loge dispose justement d’une voiture à Lelex et doit aller chercher l’autre au même endroit. Comme quoi tout s’arrange sans trop se poser de question !

Reste maintenant à trouver un lieu de pique nique sur la route de Gellin. Philippe a une idée et Michel une autre complètement différente comme on va le voir. Nous commençons par choisir l’idée de Philippe peut-être par politesse mais aussi parce que c’est sur la route de l’idée de Michel. L’idée de Philippe est de pique niquer sur les bords du lac des Rousses où des plages sont aménagées. Nous remontons donc la Valserine, cette jolie vallée où on trouve même un golf (pas la peine ici de pomper la nappe phréatique comme sur la Côte d’Azur !). Le lac des Rousses est une catastrophe : une avalanche de touristes et de gamins. Du bruit et de la fureur. C’est dommage, le coin est délicieusement joli. Sans hésiter plus longtemps nous fuyons la foule vers l’idée de Michel. On s’enfonce alors dans une forêt profonde sur des petites routes comme celles que nous avons parcourues à pied pour finalement déboucher sur une grande prairie au bout de laquelle on repère une cabane, le chalet Bonnefoy.





Il n’y a personne, la cabane est à nous, tout comme la prairie et la forêt alentour. Nous en profitons vite pour allumer le feu dans le vieux fourneau toujours en état de marche et la vieille cabane reprend vie juste pour nous ! Ce fut le dernier pique nique mais aussi le plus flamboyant ! Vin à volonté offert par Henri, les gâteaux de Lelex, les derniers Wasa de Marthe (je m’étais débarrassé des miens non utilisés dans un refuge), les derniers bouts de saucisson et certainement le dernier menu Bos du jour.
Finalement nous ne regrettons pas trop de ne pas avoir marché sur le Crêt de la Neige, le plus haut sommet du Jura.
Il ne nous reste plus qu’à rentrer à Gellin, prendre la douche, se changer en vêtement de ville, bref préparer la fête pour le soir. Sur la route, nous admirons les maisons décorées de tavaillon. En général il s’agit de plaques de tôles, mais le vrai tavaillon est fait de petites planchettes de sapins. Quant à son objectif, il faut s’imaginer en hiver dans la vallée de Mouthe, il fait –15°, le blizzard souffle emportant la neige horizontalement, il n’y a personne dehors, chacun se terrant chez lui à côté du poêle qui ronfle… Bref un temps normal en hiver puisque l’objet du tavaillon est justement de protéger la face de la maison qui regarde l’amont de la vallée !
Nous terminerons la randonnée par une visite à la source du Doubs (à côté de Gellin).

Photo prise au-dessus de la source :


Vue du Gellin :


Au chalet de Gellin, Clémence nous attendait avec son copain autrichien et les deux derniers de Claire (Martin et Juliette pour ceux qui auraient oublié). Le jeune couple s’est mis au fourneau (il faut du courage parce à deux on peut à peine se retourner dans la cuisine des Michels !) pour préparer des pâtes avec un accompagnement de légumes cuits dans une poêle. Bon je ne connais pas exactement ce qu’il y avait dans la poêle, mais c’était délicieux. Un petit Crémant du Jura pour commencer et l’affaire était entendue ! Seule la pluie nous a obligé à faire une retraite précipitée dans le chalet, mais une pluie dans le Jura fait partie de l’ordinaire. D’ailleurs nous avons finalement été gâtés de ce point de vue puisque toute la randonnée s’est déroulée par beau temps sauf le dernier jour.
Ce fut une belle aventure qui nous aura fait découvrir la tendresse du Jura. On comprend mieux cet attachement des Michels à ce petit chalet perdu à Gellin. Bon courage pour la future construction avec vue sur le Mt d’Or. Mais n’oubliez pas de placer un tavaillon sur le mur orienté au sud-ouest !